3/4 Hervé Courtain en grève 2003 2004
et
Guerre sabbatique d'une année
En 2004 après moultes actions
je trouve les machines artistiques niçoises et mon approche de toutes ces machines trop bien huilées...
Je décide de me mettre en grève...de septembre 2004 à septembre 2005.
Quand je rencontre quelqu'un qui me demande ce que je fais actuellement ma réponse est " je suis en grève " ou bien " je fais grève ".
En général il n'y a pas de seconde question du genre "Ah et pourquoi? " " Dans quel cadre? " " Depuis quand ?".
Quel impact peut bien avoir la grève d'un artiste? Artiste autoproclamé de surcroît? Plasticien, à non pas ça?
Non, l'affirmation est d'une telle incongruité que la plupart de mes interlocuteurs l'évacuent sans ( apparemment ) se poser la question du sens de ce qu'ils viennent d'entendre et passent à autre chose.
Les premières questions qui devraient nous venir à l'esprit sont : Pourquoi, qu'est-ce que vous réclamez? dans quel lieu et quel contexte, quelles sont vos revendications?
Je me demande combien de fois des artistes plasticiens, des peintres, des élèves plasticiens...
(les autres disciplines artistiques savent ce que le mot grève recouvre )
Inscription à l'EMAP
...se sont mis en grève dans le cadre de leur travail
ou de leurs jeux.
Emprunte par frottage
Je suis en grève! j'en profite pour me mettre en guerre sabbatique.
Pendant la guerre sabbatique je me déplace et je travaille en secret dans la clandestinité.
Pendant la guerre sabbatique je ne reste pas sans rien faire,
Eglise San Tullano
je suis casseur de grève lorsque j'enfreins la règle que je me suis imposée.
Le premier crâne d'une longue série
Pendant l'année sabbatique je rêve,
"je vais dans le futur et je reviens et je régresse et puis je repars. Je joue aux cartes et le temps passe."
Je brouille les cartes. En cachette je réalise de faux sténopés, 13ème au centre, voyage vers le Nil,
Pendant une année, je boycotte les vernissages, les fariboles et les ateliers.
Je voyage, je prends des notes:
à Londres,
à Berlin,
à Madrid,
à Salamanque,
à Bilbao, je me prends pour un visionnaire espagnol.
Ce jour là dans mon rêve on me vole mon sac à dos. Je me perds dans la magnifique structure de Richard Serra. Pour quitter le labyrinthe, je prends la main de ma belle et nous nous envolons dans les airs. Mais un vent froid souffle et nous sommes jetés dans des cages de verre froid et malsain. Après de multiples pérégrinations nous nous retrouvons dans une ville où les habitants vomissent et pissent partout. Je comprends que c'est l'enfer à touristes angéliques et je dis GO GO à ma Belle.
à Oviedo, je me prends pour un poète
Dis moi Villa Santa Maria Del Naranco. Dis moi Villa. Dans mon rêve je suis pénétré par la forme de cette villa et c'est tout mon être qui s'en trouve changé. Dis moi Villa Santa Maria Del Naranco. Dis moi Villa.
à Turin, en Egypte,
à Paris,
à Chantilly.
à Monaco
je découvre Chillida,
Richard Serra, Pablo Siquier, Juan Manuel Diaz-Caneja 1905-1988,
Antonio Saura, Max Beckmann, Peter Blake, Michael Landy.
Les reliques sont conservées dans les cahiers " Travaux Pratiques " N° 3 et 4
Quand je veux aller dans le futur on me dit "Entrez, Vous pouvez y aller... la porte est ouverte."
la guerre sabbatique me sauve.
Fort heureusement j'étais en grève
Après une année acharnée dans la lutte j'ai repris le bus des artistes
« J’ai eu l’impression d’aller dans toutes les directions où le voyage m’a attiré. Dans des productions passées, dans les miennes, dans celles d’artistes connus ou peu connus, d’autres civilisations, d’autres courants. En explorateur de terres inconnues, j’ai vu des lieux d’expo, des modes d’expression, des sensibilités très diverses. Je me suis mis en danger, en avant, en arrière. J’ai voyagé par la lecture, par l’écriture, par mes rencontres, par le manque, par le faire, par le défaire, par le manque de savoir-faire, par mes sens, par mes sentiments, par mes réussites et mes échecs esthétiques ou créatifs. J’ai voulu explorer le voyage au présent, en sachant qu’il me précède plus que je le voudrais. Le lieu où je n’ai pas réussi à aller c’est dans le futur. J’ai compris définitivement que le futur se construit au présent, en avant-garde, c’est difficile quand on est placé à l’arrière-garde. » Réflexions hors champ.
Mes remerciements à toutes les personnes qui m'ont demandé ce que je faisais et à qui j'ai répondu pendant une année « je suis en grève »